Le jardinier confiné :: Jour 47

Jardiner avec la lune, une « théorie » irréfutable

Il est toujours instructif, et parfois amusant, de relever les contradictions dans le discours de nos contemporains, y compris dans notre domaine de prédilection, le jardinage. Dans le dernier numéro du magazine de jardinage « L’Ami des Jardins (et de la maison) », on peut lire un petit article d’un collaborateur habituel du magazine, Denis Pépin, jardinier écologiste bien connu dans mon département (voir https://www.jardindespepins.fr/).

En voici l’essentiel :

Mettez de côté le calendrier lunaire et intervenez quand vous avez le temps, au bon moment (température du sol suffisante, terre sèche qui ne se compacte pas…) et en tenant compte des prévisions météo. Ce sera déjà bien !
Certes, la lune exerce une influence sur les fluides (marées), la reproduction de nombreux animaux mais rien ne prouve vraiment son influence sur les cultures, de leur semis à leur récolte. J’ai respecté le calendrier lunaire biodynamique pendant des années sans vraiment y croire.
C’était assez contraignant. Et puis, deux années de suite, j’ai fait des essais sur des épinards et des radis, prompts à monter à graine. Deux variétés de radis, quatre d’épinards, semés côte à côte à quatre « lunes » différentes, dont un nœud lunaire censé être la pire des situations. Résultat : aucune différence entre les modalités lunaires, mais beaucoup de différence entre les variétés quelle que soit la lune. Depuis, je n’en tiens plus compte, sans aucune conséquence sur le rendement, la qualité des récoltes et la montée à graine des laitues, épinards, radis, oignon, ail.

Ce qui n’empêche pas le même magazine de continuer à publier mois après mois et sur une pleine page, son « Calendrier Lunaire » !

Le problème de la théorie de l’influence de la lune sur la croissance des plantes c’est qu’elle est irréfutable. Cette proposition est irréfutable puisqu’il est impossible de prouver qu’elle est fausse, c’est-à-dire de prouver que la lune n’exerce pas d’influence. Mais pour qu’une théorie soit scientifique, il faut qu’elle soit non seulement réfutable, mais aussi non réfutée. Seules survivent les théories ayant passé avec succès l’examen de la réfutation. (Raisonnement repris de cet article en ligne).

Cette théorie n’en est donc pas une au sens scientifique, mais une simple « croyance », comme d’autres croyances en lien avec notre planète satellite, lire ici : La Lune en 5 mythes et croyances qui ont la vie dure.

Pour conclure, je citerai le jardinier en chef de Versailles — non, pas Alain Baraton mais son illustre prédécesseur, Jean-Baptiste de La Quintinie :

Une autre espèce d’ignorants sont ceux qui ne sauraient dire trois paroles de leur métier sans y mêler la pleine Lune et le décours1, prétendant, et n’en sachant pourtant aucune raison, que c’est une observation absolument nécessaire pour le succès de tout le jardinage.

1 Lune décroissante